Accompagner des équipes avec l’approche de la psychologie sociale.

« Des équipes performantes et heureuses de l’être. »

Je me suis régalé à lire le livre de Rodéric Maubras « Coacher une équipe avec la psychologie sociale – Déconstruire les processus de groupe pour forger des équipes performantes et heureuses de l’être. » publié aux Éditions Eyrolles.

Je suis heureux d’avoir enrichi ma boite à outils et protocoles d’intervention. J’ai la joie de nourrir mon élan de transmission en partageant avec vous ma « fiche de lecture » dans laquelle je reprends de larges extraits de cet ouvrage. Je fais l’hypothèse que cette synthèse pourra intéresser des personnes en charge de conduite le changement et d’accompagner les transformations humaines à la façon d’un coach, d’un consultant, d’un chef de projet, d’un expert en Ressources Humaines ou d’un manager.

En guise d’in(tro)duction …

> Qu’est-ce que la psychologie sociale ?

La psychologie sociale s’intéresse au fonctionnement des groupes humains et notamment à deux grandes catégories de facteurs :

  • La manière dont les comportements, les croyances et les attitudes des individus vont être influencés par la présence, explicite ou implicite, du groupe auquel ils considèrent appartenir.
  • La manière dont le groupe va devenir une entité vivante à part, avec des logiques de fonctionnement et des dynamiques propres, dont la compréhension dépasse l’analyse du fonctionnement individuel des membres qui le composent.

Quelques concepts développés par la psychologie sociale :

  • Notre avis est influencé par celui du plus grand nombre. C’est le mécanisme dit de la preuve sociale.
  • Le groupe invente ses propres normes pour fonctionner au quotidien. Il existe des normes sociales explicites et d’autres implicites. Les normes explicites font l’objet de règles formelles, les normes implicites sont définies par les usages du groupe, elles s’appuient sur le système de valeurs que le groupe partage, sur ce qui est important pour lui et sur ce qui ne l’est pas. Dans les équipes professionnelles, ces normes vont dépendre de la culture de l’entreprise, de l’histoire de l’équipe, du contexte économique. Identifier ces normes et les intégrer seront deux éléments déterminants dans le travail du coach d’équipe s’il veut ne pas avoir à lutter contre le groupe mais travailler avec lui. L’équipe créera d’autant plus d’alliance avec le coach en charge de l’accompagner qu’elle percevra chez lui une capacité à les reconnaître et à les accepter car une équipe sans normes sociales n’existe pas.
  • Nous avons une tendance au conformisme. Les membres d’un même groupe ont tendance à adopter les mêmes comportements et les mêmes attitudes sous la pression – réelle ou imaginée – des autres membres du groupe. Le coach d’équipe rencontrera régulièrement ce phénomène de conformisme, qui explique notamment pourquoi dans bien des situations, les membres d’une même équipe interrogés individuellement pourront se montrer favorable aux changements suggérés par le coach alors que prise collectivement, l’équipe pourra par la suite faire preuve d’une grande résistance à l’égard de ces mêmes changements.
  • La polarisation de groupe accentue les décisions collectives. Les membres d’un même groupe peuvent prendre ensemble des décisions plus risquées qu’individuellement. Ce phénomène est appelé polarisation de groupe.
  • Nous avons tendance à nous soumettre à l’autorité. Principe de soumission à l’autorité ou principe d’obéissance.
  • Nous faisons tous preuve de dissonance cognitive. Les membres d’une équipe se laisseront d’autant mieux accompagner que le coach aura veillé à distiller des preuves de légitimité, même de manière implicite, auprès du groupe en démarrage du processus d’accompagnement. Un coach qui ne parvient pas à instaurer une forme de leadership conforme aux représentations de l’équipe qu’il accompagne aura bien du mal à la mobiliser dans la recherche d’une nouvelle dynamique collective.
  • L’engagement public renforce l’action. Le coach d’équipe a ici un levier puissant pour permettre à un groupe de changer de fonctionnement. Toute la subtilité réside dans l’art de favoriser un débat constructif en groupe visant à amener l’équipe à prendre des décisions collectives, afin de maximiser les chances que celles-ci soient suivies de faits.
  • Nous sommes pétris de stéréotypes et de préjugés. Les stéréotypes sont l’expression de notre besoin de catégorisation sociale : ils consistent à créer des catégories d’individus correspondant à un certain nombre de critères de jugement. Ils sont propres à chaque individu et proviennent de notre vécu. Nos stéréotypes fonctionnent de concert avec leur composante affective (le préjugé). Le préjugé teinte le stéréotype d’un affect. Cet affect sera plutôt positif ou négatif selon notre histoire familiale, notre parcours de vie, notre culture, etc. Ainsi, nous associons certaines catégories d’individus à des préjugés positifs et d’autres à des préjugés négatifs. Ce couple formé d’une dimension cognitive (le stéréotype) et d’une dimension sentimentale (le préjugé) va être à l’origine d’un comportement appelé discrimination. La discrimination est un acte biaisé par nos stéréotypes et nos préjugés.
  • Le fonctionnement d’un groupe est fondé sur la cohésion sociale.
  • Un groupe développe par lui-même une dynamique qui lui est propre. Un groupe d’individus est régi par des forces qui l’influencent et qui – selon les configurations – pourront l’immobiliser ou au contraire le mettre en mouvement.

> Qu’est-ce qu’une équipe professionnelle ?

Une équipe professionnelle est un collectif d’individus rassemblé autour d’un but, d’un objectif, d’une mission commune, qui mène pour y parvenir une série d’actions complémentaires, parfois interdépendantes. La responsabilité et le suivi de ces actions sont confiés à une ou plusieurs personnes communément définies comme étant responsables de l’équipe et qualifiées de managers.

Pour résoudre un problème d’équipe, il convient d’accompagner l’équipe et non pas uniquement son responsable. C’est là tout le champ d’intervention du coaching d’équipe.

> Qu’est-ce que le coaching d’équipe ?

Le coaching d’équipe est une discipline ombrelle, non normative et stratégique, qui a pour objectif d’accompagner les collectifs professionnels dans la transformation de leur dynamique de fonctionnement en vue d’optimiser le couple épanouissement – performance au sein de leurs effectifs.

Il ne s’agit pas pour le coach d’équipe de prescrire des solutions de changement au collectif qu’il accompagne mais de prescrire un dispositif visant à faciliter le cheminement de l’équipe vers ses propres solutions.

Contrairement aux idées reçues, coacher une équipe ne se résume pas à l’animation d’un séminaire de cohésion de quelques jours. Il s’agit d’une démarche progressive qui s’inscrit dans le temps.

Un coaching d’équipe – à l’aide de la psychologie sociale – se déroule généralement en 6 phases spécifiques :

1 – Phase de cadrage : Entretien(s) préliminaire(s) avec le donneur d’ordre
2 – Phase exploratoire : Diagnostic de la dynamique de l’équipe
3 – Phase d’ingénierie : Élaboration d’un dispositif d’accompagnement
4 – Phase de travail avec l’équipe
5 – Phase de consolidation avec l’équipe
6 – Phase de bilan avec le donneur d’ordre

En guise de développement …

1 – Phase de cadrage : Entretien(s) préliminaire(s) avec le donneur d’ordre.

Le coach d’équipe prendra en considération l’avis du donneur d’ordre tout en se laissant la liberté de se faire sa propre opinion sur le dispositif d’accompagnement à mettre en place lorsqu’il sera au contact de l’équipe.

Les 3 intentions du coach d’équipe au cours de cet / ces entretien(s) préliminaire(s) avec le donneur d’ordre sont les suivantes :

  • Cadrage de la demande avec le donneur d’ordre : le coach vient comprendre une situation (rôle de « médecin d’équipe » qui écoute pour diagnostiquer et n’explique pas pourquoi et comment il est devenu médecin) à il évitera une posture trop commerciale et l’étalage de ses certifications.
  • Pré-identification des représentations sociales de l’équipe : accueillir les représentations sociales plutôt que les challenger. Rejoindre une opinion sans la partager. Obtenir la possibilité de rencontrer l’équipe avant de produire un diagnostic et de proposer un dispositif d’accompagnement.
  • Pré-identification du cycle de vie de l’équipe.
> Intention 1 : Cadrage de la demande avec le donneur d’ordre.

Le cadrage de la demande du donneur d’ordre s’effectue généralement en 5 étapes :

  • Exploration de la situation à Questionnement exploratoire du coach (« Que s’est-il passé avec l’équipe pour que vous décidiez de faire appel à une personne de l’extérieur ? Quelles sont les caractéristiques de l’équipe effectif (métier, mission, âges …) ? Y a-t-il eu d’autres événements qui ont marqué l’équipe précédemment ? Qu’avez-vous déjà essayé de mettre en place pour résoudre le problème ? »)
  • Pré-identification des représentations sociales et de leur rigidité (ce qui déterminera la marge de manœuvre du coach pour que l’équipe se transforme) –> Questionnement inductif du coach
  • Validation de la situation –> Reformulation de ponctuation & feed-back empathique du coach
  • Pré-identification des indicateurs de changements –> Questionnement résolutoire du coach (« A quoi verrez-vous que le coaching d’équipe aura réussi ? »)
  • Premières préconisations –> Reformulation de synthèse du coach
> Intention 2 : Pré-identification des représentations sociales de l’équipe.

Cette première identification peut se faire à l’aide d’une grille d’analyse des représentations sociales d’une équipe / organisation :

  • Rapport au changement
  • Rapport au pouvoir et à la prise de décision
  • Rapport à la performance
  • Rapport au temps
  • Rapport à l’échec
  • Rapport à la cause / à la raison d’être / à la mission de l’équipe
  • Rapport aux valeurs affichées / incarnées
> Intention 3 : Pré-identification du cycle de vie de l’équipe.

Mise en perspective de la demande du donneur d’ordre et des besoins de l’équipe avec les 5 phases du cycle de vie d’une équipe et le stade de développement de l’équipe :

  • Équipe en construction : cette phase est souvent synonyme de faible performance, l’équipe est plus occupée à se construire qu’à atteindre ses objectifs, d’autant que la plupart du temps, elle ne dispose pas encore d’une feuille de route claire à cette phase de vie.
  • Le premier souffle : c’est une période de grâce où, en apparence, tout fonctionne plutôt bien. L’équipe peut afficher un bon niveau de cohésion – qui peut être tout à fait sincère – mais qui est essentiellement lié au fait que l’équipe n’a pas encore connu de tempête.
  • La crise : C’est une phase critique pour l’équipe, qui va déterminer sa capacité soit à trouver son excellence si elle dépasse la crise de manière constructive, soit – au contraire – à opter pour une forme de résignation collective qui va peu à peu conduire les membres de l’équipe à normaliser l’échec et à faire en sorte d’accepter les défauts de l’équipe sans tenter de les corriger.
  • Le second souffle : c’est l’étape où se construit une cohésion plus profonde.
  • L’excellence : l’équipe stabilise un fonctionnement qui allie un haut niveau de performance collective et une capacité de chaque membre à s’épanouir dans le collectif. Les périodes de tempête sont banalisées et ne sont plus synonymes de crise, mais sont considérés par le groupe comme une opportunité d’innovation.

2 – Phase exploratoire : Diagnostic de la dynamique de l’équipe.

L’intention du coach est d’identifier les principales dynamiques de l’équipe à partir des signes caractéristiques visibles.

> Déséquilibre au niveau des pouvoirs individuels.
Dynamique de l’autocratie (excès de centralisation du pouvoir).

Management directif et autoritaire. Leader naturel dans l’équipe en compétition avec le manager. Situation de harcèlement professionnel. Phénomène du « dragon » (une personne que tout le reste de l’équipe redoute). Phénomène de rétention d’information ou d’expertise.

Dynamique de la passivité (équipe sans pouvoir).

Discours fataliste et résigné, partagé par la plupart des membres de l’équipe voire même le manager. Victimisation, évocation systématique des causes externes à l’équipe pour expliquer les problèmes rencontrés. Incapacité à imaginer d’autres situations que la situation actuellement vécue. Discours focalisé sur les problèmes et non sur les solutions.

Dynamique d’opposition (équipe en résistance).

Méfiance systématique à l’égard de tout nouveau venu, de toute nouvelle idée. Manifestation active contre les velléités de transformations qui concerneraient l’équipe. Refus de toute proposition de changement. Colère omniprésente dans le collectif avec plusieurs manifestations possibles (agressivité, ironie, rejet, indifférence / au coach d’équipe).

Dynamique de compétition.

Prévalence des logiques individuelles sur la logique collective. Volonté de se montrer performant. Peu d’intérêt pour les autres membres de l’équipe au-delà de leurs capacités professionnelles. Besoin de challenges internes, appétence pour les situations permettant de démontrer qui dans l’équipe est le meilleur, le plus compétent.

> Déséquilibre du lien social.
Dynamique du non lien.

Absence de connaissances mutuelles dans l’équipe, manque d’intérêt pour autrui. Dominance d’individus focalisés sur leur activité propre, sans volonté de partage avec les autres, prédominance des logiques de silos. Échanges d’informations cantonnées au strict minimum et focalisées sur le plan professionnel. Absence d’entraide en cas de crise, chacun cherchant à rejeter la faute sur un collègue.

Dynamique du non-dit.

Les membres de l’équipe déclarent faire preuve d’une bonne entente mutuelle et ne pas avoir de désaccord. Les antagonismes ne sont jamais évoqués dans l’équipe par peur du conflit. Les membres de l’équipe peuvent être très critiques les uns à l’égard des autres lorsqu’ils parlent de leur équipe à une tierce personne, mais n’évoquent jamais leurs griefs directement à la personne concernée. En cas de problème, l’équipe adopte une dynamique de passivité pour éviter de confronter les points de vue et risquer des emportements.

Dynamique de l’exclusion (bouc-émissarisation).

L’équipe affiche une bonne entente, qui n’existe que par une communauté de critiques à l’encontre d’une ou plusieurs personnes. L’équipe se rassemble et forge son identité dans l’exclusion d’une partie de ses membres. Tous les problèmes de l’équipe sont systématiquement attribués à un ou plusieurs individus jugés responsables de tout. Bouc-émissarisation systématique.

Dynamique du conflit.

Les membres de l’équipe sont très critiques les uns vis-à-vis des autres ils n’éprouvent pas de difficultés à le dire : ils passent leur temps à se faire des reproches mutuels. Les propos peuvent être virulent, les personnes démontrant une sorte de fierté d’appartenir à une équipe où personne n’a peur de dire ce qu’il pense. Le conflit est une norme dans l’équipe. Il semble plus intéressant de débattre que de trouver des solutions.

Dynamique sur-affective.

Les relations professionnelles entre les membres de l’équipe apparaissent dominées par l’affect. Les modalités de communication sont dominées par le fait de savoir qui apprécie qui. Le groupe fait preuve d’immaturité professionnelle. Les manifestations émotionnelles de tout ordre apparaissent très vite. Toute crise est surinvestie avec émotion et devient l’objet d’une nouvelle théâtralisation. Le groupe s’auto entretient dans la contagion émotionnelle et éprouve beaucoup de difficultés avec les règles formelles, l’informel dominant l’activité de l’équipe. De multiples alliances affinitaires existent et conditionnent la performance de l’équipe.

> Déséquilibre au niveau des normes.
Dynamique bureaucratique.

Le formalisme est une norme centrale, l’équipe fonctionne grâce à un ensemble de règles tout aussi strictes que nombreuses. Les membres de l’équipe se retrouvent autour de valeurs telles que la rigueur, la discipline et le sens du détail. L’équipe peut surperformer puis tomber brusquement en échec si une situation sort du scénario habituel. La résistance au stress lié à l’imprévu et la capacité d’innovation sont faibles.

Dynamique de l’informel.

Les membres de l’équipe fonctionnent sans règles établies, l’improvisation est la norme principale. Le management est en général bienveillant, déployant un discours centré sur l’autonomie de chacun mais généralement à la limite du laxisme. Les membres de l’équipe ont du mal à expliquer comment les décisions se prennent, quel est le but commun, qui est responsable de quoi, etc. Les récits des membres de l’équipe sont en général aussi déstructurés que l’est l’organisation de leur équipe. Il règne généralement de la confusion et du flou sur la manière de mener les actions. Peu de résistance au changement. La gestion des anomalies est plutôt facile mais l’équipe sera généralement incapable de reproduire deux fois la même procédure / réponse car celle-ci n’est pas formalisée.

Dynamique de l’inconstance.

Les normes explicites existent mais elles ont une très faible durée de vie et changent en permanence. Le manager est volontaire mais souffre d’un défaut de confiance en ses propres capacités et ne cesse de changer d’avis. L’équipe soumise à cette dynamique affiche souvent des signes visibles de fatigue. L’action a du mal à être menée à bien car les plans de mises en œuvre ne cessent d’évoluer, tout comme l’objectif commun. L’équipe est incapable de s’expliquer la stratégie qui sous-tend l’action à mener.

> Déséquilibre lié à la pression sociale.
Dynamique d’entrave.

L’équipe est soumise à un excès d’influence de la part de son environnement. Les forces exercées sur elles sont nombreuses ou très intenses et l’empêchent de mener à bien sa mission. Les membres de l’équipe, tout comme le manager, se sentent incapables d’agir contre la puissance de la pression sociale. Ces contraintes sont en général facilement identifiées par l’équipe quand il s’agit de contraintes externes (concurrents, réglementation…). Les équipes ont souvent plus de mal à identifier les contraintes venant de l’organisation car elles ont normalisé ces dernières (influence paralysante d’une autre équipe, politique de la direction…). Les équipes soumises à cette dynamique affichent généralement de la résignation et peu d’optimisme sur leur capacité de mouvement.

Dynamique de l’invisibilité.

L’équipe est comme isolée du reste de l’organisation. La pression sociale est inexistante, aucune force n’agit sur elle depuis l’extérieur. Elle souffre d’un manque d’intérêt vis-à-vis de son action. Le manager a souvent beaucoup de mal à fixer un cap car il n’a lui-même que très peu de directives. L’équipe dérive et comble le vide mais souffre en général d’un important manque de reconnaissance. Le coach d’équipe a lui-même du mal à définir des objectifs clairs avec le donneur d’ordre, le coaching d’équipe étant souvent utilisé comme une action palliative pour satisfaire à une stratégie politique (comme par exemple maintenir des relations pacifiées avec les représentants du personnel).

Les forces à l’œuvre dans une équipe : 5 types de pouvoir peuvent être exercés dans une équipe, que ce soit par le manager ou les collaborateurs :

  • Le pouvoir de la personnalité : un seul individu, par sa personnalité, peut disposer d’une capacité d’influence considérable sur ses pairs. Il s’agit de personnes dotées d’une certaine forme de leadership naturel qui, sans le rechercher particulièrement, ont la particularité de fédérer autour d’elles et d’avoir un impact sur la capacité de mouvement de l’équipe. Ces leaders d’opinion sont capables de cristalliser à eux seuls la résistance de toute une équipe ou au contraire de lui permettre de conduire des transformations profondes.
  • Le pouvoir de l’information : un tel pouvoir est tout aussi déterminant dans la dynamique d’une équipe. Qui détient quelle information ?
  • Le pouvoir de l’expertise : celui qui détient l’expertise, la connaissance technique appliquée à une compétence, un savoir-faire, qui lui permet d’intervenir là où ses collègues ne le peuvent pas dispose d’un pouvoir considérable sur le reste de l’équipe.
  • Le pouvoir de l’histoire : une équipe pourra se trouver incapable de mouvement parce qu’immobilisée par son histoire. Trop de changements avortés et de solutions non efficaces face à ses difficultés pourront la rendre totalement insensible à toute aide externe de transformation.
  • Le pouvoir hiérarchique : c’est probablement le plus visible pour le coach qui découvre une nouvelle équipe. La qualité du management hiérarchique aura une influence tout aussi décisive sur la capacité d’une équipe à se transformer.

3 – Phase d’ingénierie : Élaboration d’un dispositif d’accompagnement.

Parce qu’une équipe a besoin de temps pour se transformer, un coaching d’équipe s’étale généralement sur une durée de 3 à 6 mois.

> Le choix des formats d’intervention :

Le dispositif d’intervention peut comprendre plusieurs formats :

  • Coaching individuel : accompagnement personnalisé d’un membre de l’équipe dont les difficultés rejaillissent sur le collectif. Durée indicative : 8 sessions d’1h30.
  • Observation in vivo : observation de l’équipe en situation de travail. L’intention est de récolter des informations sur le fonctionnement de l’équipe en évitant le filtre du récit du donneur d’ordre ou des membres de l’équipe. Durée indicative : 2 heures à une ½ journée.
  • Séminaire de travail : session collective d’une ou plusieurs journées en dehors du lieu de travail. L’intention est de permettre à l’équipe de réfléchir, de travailler sur des changements en profondeur, d’expérimenter de nouvelles façons d’interagir. Durée indicative : 1 à 2 journées.
  • Atelier de travail (workshop) : session collective courte réalisée sur le lieu de travail habituel. L’intention est de travailler sur un sujet spécifique en collectif, de faire un bilan ou un suivi (follow up / consolidation) des nouvelles façons d’être en relation et d’interagir. Durée indicative : une ½ journée.
  • Formation : transmission de connaissances. L’intention est de permettre à l’équipe de monter en compétences sur un sujet en particulier. Durée indicative : 1 à 2 journées.
  • Médiation : résolution d’un conflit entre deux membres de l’équipe pour éviter la contagion au groupe d’une difficulté relationnelle interpersonnelle. Durée indicative : 3 sessions d’1h30 chacune.
  • Team building : activité ludique pratiquée en dehors du lieu de travail de l’équipe. L’intention est de décadrer l’équipe pour lui faire prendre conscience de ses modalités de fonctionnement, de célébrer un temps fort ou une réussite. Durée indicative : 2 heures à une ½ journée.
> Le choix des personnes à accompagner :

A l’issue des entretiens exploratoires, le coach d’équipe pourra décider de ne pas travailler immédiatement avec l’ensemble de l’équipe, mais seulement avec une partie de celle-ci.

Il ne s’agit pas de stigmatiser qui que ce soit mais de réaliser un accompagnement préalable qui favorise les conditions d’un travail collectif efficace lorsqu’il s’agira de réunir toute l’équipe.

Parmi les motifs nécessitant un travail préalable avec certains membres de l’équipe : le besoin de monter en compétences du manager, un conflit entre deux membres de l’équipe, une personne exclue du reste du groupe, l’existence de clans au sein de l’équipe, une personne dans l’équipe ou en dehors de l’équipe exerçant un pouvoir important sur l’équipe (pouvoir autre que le pouvoir hiérarchique) …

> Le choix du nombre et des types d’intervenants :

Le coach d’équipe est en quelque sorte l’architecte et le chef d’orchestre dont la responsabilité et de veiller au bon déroulement du dispositif imaginé à la suite des entretiens exploratoires.

Il n’y a pas de règle absolue en ce qui concerne le choix du nombre et du type d’intervenants. Trois facteurs sont cependant à prendre en compte : la taille de l’équipe, la complexité de la situation rencontrée et la composition du dispositif d’accompagnement.

La taille de l’équipe : Il est recommandé au coach d’équipe de proposer au donneur d’ordre un second intervenant dès lors que l’équipe dépasse 15 à 20 personnes. Cela permet de répartir la charge de travail liée aux entretiens individuels à mener lors de la phase exploratoire. Cela permet également lors des sessions de travail plénières avec le groupe que l’un des coachs puisse observer l’équipe pendant que l’autre anime.

La complexité de la situation rencontrée : Face à des situations de coaching d’équipe complexe, il est fortement recommandé de travailler avec le support d’un superviseur externe.

La composition du dispositif d’accompagnement : Lorsque le dispositif d’accompagnement en coaching d’équipe inclut de multiples formats d’intervention, il est fortement recommandé au coach d’équipe de ne pas jouer tous les rôles. D’une part, il ne dispose pas de toutes les compétences nécessaires et conservera (humblement) sa crédibilité vis-à-vis du donneur d’ordre. D’autre part, il préservera une meilleure vision d’ensemble s’il n’est pas accaparé par la mise en œuvre opérationnelle de toutes les phases du dispositif d’accompagnement.

> Le choix du planning des différentes interventions et leur lieu :

Une équipe est un organisme vivant et complexe qui évolue au sein d’un environnement vivant et complexe. De multiples événements traversent l’équipe au quotidien et il est essentiel pour le coach d’équipe de garder le contact avec cette réalité quotidienne afin de pouvoir faire évoluer son dispositif d’intervention si nécessaire.

Un bon espacement entre deux sessions de travail avec tout ou partie de l’équipe a une fréquence pouvant varier de bimensuelle à mensuelle. Le coach d’équipe veillera à organiser son dispositif de manière à être en contact avec l’équipe (lui-même ou ses intervenants) idéalement tous les 15 jours (au minimum une fois par mois) pendant le déroulement de son dispositif d’intervention.

Plusieurs facteurs interviennent également dans le choix de la localisation des différentes séquences : le confort de travail de l’équipe, le besoin de décadrer l’équipe (en lui proposant un cadre de travail différent du quotidien) et les impératifs budgétaires du donneur d’ordre.

4 – Phase de travail avec l’équipe.

Pour travailler avec l’équipe, le coach s’aidera des 5 étapes de la méthode ADWEC (Alliance – Diagnostic – Wake up – Experience – Commitment) : une démarche structurée pour permettre à un groupe de changer de dynamique.

> Étape 1 : Alliance.

L’intention est de créer un lien de confiance avec le groupe. Tant que le coach d’équipe n’aura pas réussi à créer cette alliance, aucun travail ne peut s’engager avec le groupe.

Même si le coach a rencontré préalablement individuellement tous les membres de l’équipe, il est nécessaire de prendre le temps de construire un lien de confiance avec l’entité « équipe ».

> Étape 2 : Diagnostic.

L’intention est d’amener le groupe à analyser son propre fonctionnement en équipe. Le coach devra veiller à faciliter le processus de réflexion et ne pas partager son diagnostic à ce stade. Il est essentiel que l’équipe réfléchisse par elle-même.

La phase diagnostic consiste à proposer à l’équipe une grille d’analyse de son fonctionnement afin qu’elle puisse identifier elle-même les spécificités de son fonctionnement. Ce faisant, il y a de fortes chances que l’équipe parvienne à un diagnostic différent de celui du coach et ce sera Ok. Le coach saura ne pas y accorder d’importance car l’essentiel à cette étape est que l’équipe accepte de « s’auto-analyser ».

Exemple de grille d’auto-analyse de la dynamique de l’équipe :

Le travail se fait individuellement avant un partage en sous-groupes puis une restitution des sous-groupes au grand groupe. L’équipe s’accordera progressivement sur la dynamique qui est la sienne.

À chaque proposition ci-dessous, les membres de l’équipe répondent par : Plutôt Oui ou Plutôt Non. Les commentaires sont bienvenus.

                                                                                   Plutôt Oui  –  Plutôt Non    Commentaires

Pouvoirs individuels :

  • La répartition des pouvoirs est équilibrée dans l’équipe.
  • Le manager décide seul pour l’ensemble des sujets.
  • Il y a d’autres pouvoirs à l’œuvre dans l’équipe que le pouvoir hiérarchique.
  • Chaque membre de l’équipe dispose d’une certaine autonomie de réflexion, de décision et d’action.
  • Les compétences et talents individuels sont bien exploités dans l’équipe.
  • L’équipe a le sentiment de pouvoir influencer son propre destin.

Lien social :

  • Les membres de l’équipe se connaissent bien.
  • Les membres de l’équipe s’apprécient et s’entendent bien.
  • Les membres de l’équipe partagent les mêmes valeurs.
  • Il existe des liens d’amitié fort entre certains membres de l’équipe.
  • Les membres de l’équipe n’ont pas peur du conflit et savent se confronter avec bienveillance.
  • Les membres de l’équipe savent débattre ensemble mais ont du mal à parvenir à une solution.
  • Les membres de l’équipe savent trouver des solutions lorsque l’équipe rencontre des problèmes.
  • Certains membres de l’équipe sont un peu en marge du groupe.
  • Les membres de l’équipe connaissent bien le métier des autres membres de l’équipe.
  • Les membres de l’équipe savent se donner des conseils mutuels.
  • Les membres de l’équipe acceptent facilement la critique si elle est formulée de façon constructive.
  • En cas de gros problèmes, tous les membres de l’équipe se mettent autour de la table au lieu de rejeter la faute sur d’autres.
  • Les membres de l’équipe se proposent régulièrement de l’aide entre eux.

Normes sociales :

  • L’équipe dispose de règles de fonctionnement formelles pour travailler au quotidien.
  • L’équipe dispose de nombreuses règles pour organiser son fonctionnement.
  • L’équipe a l’impression que les objectifs et les règles de fonctionnement de l’équipe changent tout le temps.
  • L’équipe a l’impression que les informations circulent efficacement au sein du collectif.
  • L’équipe fait des réunions collectives régulièrement.
  • L’équipe dispose de règles pour mener des réunions efficaces.
  • Des points réguliers sont faits entre chaque membre de l’équipe et le manager.
  • Chaque membre de l’équipe sait précisément quelle est sa mission est ce qu’il a à faire.
  • L’objectif commun et la mission de l’équipe sont explicités et connus de tous.
  • Les équipes disposent de processus de prise de décision clairs pour tous.
  • L’équipe a élaboré des protocoles d’entraide ou de gestion de crise.
  • L’équipe dispose de méthodes pour stimuler sa créativité.

Pression sociale :

  • L’équipe a l’impression que son fonctionnement est parfois empêché cause d’éléments extérieurs (dans ou en dehors l’organisation).
  • L’équipe est en phase avec la culture de l’organisation.
  • L’équipe constate l’intérêt de son action pour le reste de l’organisation.
  • L’équipe a l’impression de ne pas compter aux yeux du reste de l’organisation.
  • L’équipe est empêchée de fonctionner correctement par d’autres équipes.
  • L’équipe connaît la stratégie globale de l’organisation.
  • L’équipe partage la stratégie décidée par l’équipe dirigeante.
> Étape 3 : Wake up.

Cette phase est probablement la plus intangible de toutes dans la mesure où c’est l’équipe qui va choisir de l’enclencher et non le coach.

Elle s’apparente à ce que Kurt Lewin appelle l’étape du dégel (« Unfreeze ») lorsque l’équipe réalise qu’il est peut-être possible d’envisager une autre manière de faire. C’est le point de bascule dans le dispositif du coach d’équipe. Le groupe prend conscience collectivement de ce qui pourrait mieux fonctionner. Il accepte de voir les imperfections de sa situation et entrevoit des marges de progrès. À partir de cette prise de conscience collective, ce n’est plus le coach qui impulse le mouvement mais l’équipe qui entrevoit désormais les bénéfices concrets à s’emparer du processus. Le coach devra agir avec prudence car l’acceptation est fragile à ce stade.

Kurt Lewin a développé une vision du changement à travers un processus en trois étapes : Unfreeze – Change – Refreeze

  • Unfreeze (dégel) : Il s’agit de faire prendre conscience au groupe de l’existence de ses habitudes et de son attachement à la norme qui régit ses conduites.
  • Change : Il s’agit de faire faire au groupe l’expérience de nouvelles pratiques.
  • Refreeze (regel) : Il s’agit de créer des nouvelles conduites dans la durée afin qu’elles deviennent peu à peu une nouvelle norme sociale pour le groupe.
> Étape 4 : Experience.

L’intention est de faire expérimenter au groupe de nouvelles modalités de fonctionnement (« Change »). L’équipe découvre les prémices d’une nouvelle dynamique plus vertueuse.

Le coach d’équipe joue un rôle crucial pour orienter le groupe vers la recherche de convergences, la découverte de nouvelles pratiques et leur conversion en nouvelles règles.

> Étape 5 : Commitment.

L’intention est de faire élaborer à l’équipe un plan d’action et pour l’après coaching. Bon nombre de session de travail collectif avec une équipe ne donnent pas les résultats attendus lorsque chacun retourne à ses obligations professionnelles quotidiennes. Le coach a pour objectif de créer un enseignement individuel et collectif au sein de l’équipe afin de lui permettre la construction d’une nouvelle dynamique vertueuse et durable (« Refreeze »).

  • A titre exceptionnel en posture haute, le coach pourra invoquer son expérience avec d’autres équipes et sa propre expertise en matière de diagnostic pour valider les progrès réalisés par l’équipe.
  • Le coach obtiendra un engagement collectif et un engagement individuel de chacun, pris devant le groupe.
  • Le coach normalisera les rechutes éventuelles : cela consiste à évoquer avec le groupe la possibilité que malgré toutes les intentions nouvelles et les bonnes résolutions, il est possible que des difficultés surgissent pour appliquer les changements décidés au quotidien. L’intention du coach et de maximiser les chances que le groupe ne se décourage pas au premier obstacle lorsque l’équipe sera en prise avec son quotidien.

5 – Phase de consolidation avec l’équipe.

La phase de consolidation avec une équipe est souvent oubliée en coaching d’équipe.

Il est important d’intégrer des sessions de consolidation. Celles-ci peuvent prendre la forme de réunions collectives (workshops) avec l’équipe sur son lieu de travail habituel. Ces sessions sont espacées d’un mois chacune et durent au maximum une ½ journée.

L’objectif n’est pas de reprendre un travail de fond sur la dynamique du groupe mais plutôt de vérifier avec l’équipe qu’elle a bien réussi à mettre en application les modalités décidées à l’issue du dispositif de coaching. Le cas échéant, il s’agira de traiter avec l’équipe les difficultés rencontrées afin d’ajuster les changements de comportements.

6 – Phase de bilan avec le donneur d’ordre.

Comme un coaching individuel se clôture par une tri/quadripartite de restitution, un coaching d’équipe comporte une fin de processus et se concrétise par un bilan avec le donneur d’ordre (et éventuellement la DRH) sur les progrès réalisés par l’équipe.

La phase de bilan est marquée par un entretien de clôture entre le coach et le donneur d’ordre, pouvant parfois inclure le manager de l’équipe et la DRH. A l’occasion de cet entretien, le coach fait une restitution qui récapitule les objectifs initiaux du coaching d’équipe, la problématique de l’équipe, le dispositif d’accompagnement mis en œuvre, l’évolution du processus de travail avec l’équipe et les progrès constatés lors des sessions de consolidation.

En guise de conclusion …

Diagnostiquer, c’est littéralement « voir à travers » (dia gnosis), créer une lucidité nouvelle sur la réalité quotidienne.

Lors d’un diagnostic sociologique, la sociologie des organisations propose d’étudier 5 axes :

1. Les pressions externes : contingences économiques, techniques, règlementaires.

2. Les pressions sociotechniques : structure organisationnelle interne de l’entreprise.

3. Les relations de pouvoir.

4. Les modes de socialisation.

5. Les modes de légitimation.

A l’issue d’un diagnostic sociologique du système social d’entreprise, un pronostic est réalisé.

Et comme tout pronostic, il n’est pas gravé dans le marbre et comporte un plan d’actions défini, validé et accepté qui peut évoluer au fur et à mesure de l’intervention.

Dans cet ouvrage sur le coaching d’équipe à l’aide de la psychologie sociale, les points 3, 4 et 5, au cœur de la dynamique sociale, sont prépondérants.

De nos jours, où la transversalité, l’agilité et la coopération sont prônés, le protocole présenté peut donner un éclairage pertinent et une prise de conscience des acteurs en douceur, sous réserve que le cadre soit bien défini quant au protocole, aux rôles, aux attendus et à la restitution.

Ces étapes conditionnent la confiance, l’alliance et l’appropriation de la démarche.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Quelle est votre expérience de la conduite du changement et l’accompagnement des transformations humaines ? Vos commentaires et partages d’expériences sont les bienvenus en bas de cet article.

Si vous avez des questions ou souhaitez en savoir plus sur ma pratique de l’accompagnement des transformations humaines en collectif, sentez vous libre de prendre contact avec moi.

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Laurent Claret

 

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1 Commentaire

  1. Eric

    Merci pour cette fiche de lecture très complète.

    Réponse

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